Brève réflexion sur la commémoration de la rafle du Vél d'Hiv’ et sa couverture par la
télévision publique
La puissance idéologique* du sport
Ou quand les événement sportifs passent bien avant les moments majeurs de notre Histoire. En toute neutralité...
Le Président de la République François Hollande a
présidé le dimanche 22 juillet la
commémoration du Vel d'Hiv', à Paris, 70 ans après la grande rafle qui a marqué
un tournant dans la persécution des juifs sous le régime de Vichy. Les 16 et 17
juillet 1942, environ 13.000 juifs ont été arrêtés en région parisienne par les
forces de police françaises sur instruction du gouvernement de Vichy.
Les chaines publiques de télévision n’ont pas jugé
utile, bon ou décent de bouleverser leurs
programmes pour diffuser une telle cérémonie et permettre au plus grand nombre
d’écouter le discours du Président de la République. Les dessins animés Scooby Doo et Batman sur
France 3 et le feuilleton Plus belle la
vie sur France 4 ont été diffusés… normalement.
Il y a quelques
semaines, un autre événement avait été traité différemment par France 3. Deux rencontres du premier ou
du second tour du tournoi de tennis de Roland Garros avaient alors conduit la chaîne à modifier
en toute hâte, à deux reprises, ses programmes de
soirée.
Chacun appréciera
les choix faits. Des choix ni anodins, ni innocents. Et ce n’est pas
fini.
Du 15 juin au 15 août, l’Open de France de tennis, le
championnat d’Europe de football, le Tour de France et les Jeux Olympiques
auront occupé des dizaines et des dizaines d’heures d’antenne sur les chaînes
publiques.
Le Président de la
République a dit haut et fort ce 22 juillet qu’il fallait
“transmettre la
mémoire” et “combattre l’oubli”.
Les jeunes connaissent mieux les « bobos » de Tony
Parker et les dernières aventures
amoureuses de nos champions et championnes que les moments tragiques de
l’Histoire de France (1). Est-ce surprenant ? La télévision publique n’a rien
fait ce 22 juillet pour modifier le terrible cours des
choses.
Entre les beaux discours
et la réalité, il y a souvent un fossé (les sportifs sont les mieux placés pour
le savoir).
Le matraquage sportif va se poursuivre. Pendant les
quinze jours londoniens, les petites histoires supplanteront encore la grande
Histoire (y compris l’histoire sombre de l’Olympisme illustrée par les Jeux de
Berlin de 1936).
Le sport
sature notre espace et notre temps. Or, malgré ses centaines de millions de
licenciés sur la planète, ses milliards de téléspectateurs, son intégration
totale à «l'économie-monde», son implacable marchandisation, sa puissance
idéologique, il reste un sujet méconnu et tabou. Mais un sujet omniprésent dans
la vie quotidienne et sur nos écrans de télévision.
Malheureusement,
un élément essentiel est oublié :
limiter l’analyse du
système sportif à ce qu’il montre c’est ignorer tout ce qu’il occulte et qui est
loin d’être secondaire.
_________
* On pourrait parler du “Pouvoir
spirituel du sport” ou de “L’emprise du
sport”
________
(1). Même s’il faut se méfier des sondages, y compris du
sondage relatif à la connaissance de la rafle du Vel d’Hiv chez les plus
jeunes.
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